Sous le thème « À nos mémoires », la 8ᵉ édition du festival « Univers des mots », organisée par la compagnie La Muse, se déroule actuellement à Conakry. Cet événement rassemble des artistes guinéens et internationaux qui enchantent le public. Dans un entretien exclusif accordé à notre correspondant, le commissaire général de cette édition, Nadjindo Alex, revient sur le déroulement du festival, les défis rencontrés ainsi que les perspectives d’avenir.
Propos recueillis par Ibrahima Soya
Pour SITANEWS à Conakry
Dans quel état d’esprit se déroule cette 8ème édition du festival "Univers des mots" ?
Cette édition se déroule dans un esprit de fierté et d’enthousiasme. C’est la première fois que nous avons réuni des binômes d’artistes guinéens et français, qui ont travaillé plus d’un mois en résidence. Ces artistes ont développé des projets autour de thématiques telles que la traite négrière ou la disparité entre les modes de vie à Conakry et Paris. Plusieurs autres thèmes ont également été abordés. Cette présentation est source de fierté, car nous avons mené à bien des projets d’envergure. L’édition se déroule dans un sentiment mêlé de fierté et de résilience. Nous avons pu programmer de nouveaux spectacles, avec une forte diffusion.
Malheureusement, la période choisie coïncide avec de nombreuses autres activités, comme la "BIEGUIP" ou la "Nuit du Cirque", ce qui a un peu compliqué le remplissage des salles. Les demandes étaient là, les billets rapidement épuisés. Les difficultés étaient donc essentiellement dues à des contraintes externes. Mais de façon générale, tout se passe très bien : aucun incident à signaler, le public est satisfait et les artistes ont été appréciés.
Pouvez-vous nous rappeler les têtes d’affiche de cet événement ?
Parmi les têtes d’affiche, nous retrouvons le "Slameur De l’Ombre" - Bademba, qui a collaboré avec une danseuse française. Il y a également Bappa, humoriste, associé à un danseur camerounais. Mohamed Lamine Soumah, scénographe et comédien, a lui aussi travaillé avec un artiste français. Ces profils sont des références du théâtre et de la musique en Guinée. C’est un défi pour nous, et une perspective de diversification, afin que le festival ne soit plus uniquement centré sur le théâtre, mais s’ouvre aussi au slam, à la musique et à la danse. Nous avons ainsi accueilli un spectacle qui retrace l’histoire d’un Guinéen installé en France, racontant son parcours sur dix ans.
Après la 7ème édition, quelle est la nouvelle orientation du festival "Univers des mots" ?
L’idée directrice est d’amener le spectacle vers les quartiers défavorisés, bercés par la culture théâtrale. C’est pour cela que nous avons mis l’accent sur le quartier de Nongo, à la Maison des jeunes, et mené des actions auprès des élèves, notamment à Don Bosco. Les élèves et l’administration ont fortement apprécié ; ils ont même sollicité une nouvelle représentation, mais le programme officiel ne le permettait pas. La première perspective est donc d’offrir un accès au théâtre à la population défavorisée. La seconde consiste à élargir à d’autres domaines culturels. Nous ne souhaitons plus nous limiter au théâtre, mais aussi intégrer la danse, la musique et l’ensemble des secteurs de l’industrie culturelle et créative.
Quels sont les enjeux du festival ?
Les enjeux majeurs sont principalement financiers. Le modèle économique du festival rencontre des soucis, faute d’un financement suffisant de la part de certains acteurs du secteur culturel. Cependant, les autorités ont intégré la culture dans le programme Simandou, qui prévoit un investissement réel dans ce domaine. Il en résulte actuellement de nombreuses initiatives culturelles à Conakry, offrant à la population une diversité de choix : BIEGUIP, Univers des mots, Nuit du Cirque, etc. Cela démontre la volonté institutionnelle de soutenir le secteur culturel, même si les partenaires traditionnels restent moins enclins à investir dans le théâtre aujourd’hui.
Dans les 10 à 15 ans à venir, que deviendra le festival "Univers des mots" ?
Le festival existe depuis 12 ans, débutant en 2012 et arrivant aujourd’hui à sa 8ème édition. Nous nous adaptons selon la demande du public et l’évolution du pays. Pour cette édition, le thème « À nos mémoires » illustre notre volonté de progresser sans oublier le passé. Dans 10 ou 15 ans, nous espérons voir le festival évoluer favorablement. Si le projet Simandou se confirme avec un véritable soutien financier aux industries culturelles et créatives, notamment avec la construction du musée virtuel, plusieurs pistes pourront être explorées pour donner plus de visibilité, d’énergie et d’offres culturelles aux passionnés de théâtre en Guinée.
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